ELGUARNI Mehdi |

La maîtrise est un des piliers essentiels du management de projet qui donne à la planification sa raison d’être et permet à l’équipe de projet de prouver qu’elle est sur le bon chemin. Pour simplifier les concepts, en Prédictif comme en Agile, la maîtrise permet de mesurer et comparer les performances réalisées contre les performances planifiées, d’analyser les écarts, d’évaluer les tendances et de remettre le projet sur les rails si un décalage est constaté via des actions correctives et/ou préventives.

Le processus de la maîtrise semble simple dans la théorie, mais l’est-il réellement dans la réalité ? La réponse serait sans doute par l’affirmative pour certains projets, dans certains domaines et sous certaines conditions. Par contre, c’est une négation ferme dans la majorité des projets, car la maîtrise exige une planification assez complète, des métriques « SMART » à mesurer, un système de mesure efficace et suffisamment synchronisé avec la cadence propre du projet, une gouvernance assez agile et réactive facilitant les prises de décision, et finalement un processus de gestion des changements assez rodé pour permettre une flexibilité entre les différentes références de planifications du projet.

Pour faciliter l’analyse, la maîtrise de projet pourrait être comparée analogiquement avec les systèmes d’asservissement qui permettent d’atteindre une valeur cible et de la maintenir. La valeur cible étant pour un projet ses références de base. Sachant que tout système d’asservissement pouvant être évalué selon trois critères qui sont sa rapidité, sa précision et sa stabilité, cet article essaiera d’analyser l’impact de chacun des freins de la maîtrise efficace sur ces trois critères.

Les obstacles à une maîtrise optimale des projets sont nombreux, mais puisqu’elle repose principalement sur le Système de management de l’information du projet (PMIS), ce dernier et l’équipe qui s’en occupe, pourraient être la plus grande source des problèmes pour le pilotage. Une équipe de maîtrise qui manque de ressources, de compétences, de moyens ou de formation pourrait facilement être le talon d’Achille pour une maîtrise optimale. Dans le même sens, une collecte non uniforme des informations et/ou puisant, à la fois, dans des sources décorrélées avec des moyens « traditionnels » et en décalage avec les exigences techniques et technologiques du projet apporteront, sans doute, une plus grande perte de précision dans le système de maîtrise du projet.

Étant donné que le PMIS est avant tout des moyens, des outils et des pratiques, et sachant que le processus de maîtrise est utilisé itérativement, cela implique que le PMIS détient une fréquence propre dépendant de ses composantes. Les complications apparaissent à cause d’une fréquence de mesure asynchrone avec la fréquence des instances du projet (Daily-meeting, Hebdo, COPIL, …). Ajoutons à cela un mauvais dimensionnement du format des rapports de maîtrise et nous y voilà avec des dérives estompées ou de fausses alertes sur les performances réelles du projet. L’impact de ce pilotage à deux vitesses s’accentue encore plus lorsqu’une grande partie des indicateurs utilisés sont du type « Lagging-KPI », collectés bien en retard après la concrétisation de la performance. Ceci fait qu’impérativement il y aura toujours un temps mort affaiblissant le PMIS et causant un manque de précision dans les actions préventives/correctives qui ne cibleront plus les causes racines des écarts.

Les ressources et les outils ne sont pas les seules sources de difficulté pour la maîtrise des projets. La deuxième partie de cet article traitera d’autres freins empêchant une meilleure maîtrise de vos projets.

La suite à venir…

Bibliographie

  • Project Management Institute, A guide to the Project Management Body of Knowledge seventh Edition and the Standard for Project Management, 2021
  • Project Management Institute. 2017. A Guide to the Project Management Body of Knowledge (PMBOK Guide). 6th ed. Newton Square, PA: Project Management Institute.
  • Project Management Institute, Managing Change in Organizations: A Practice Guide (2013)

À propos de l’auteur

ELGUARNI Mehdi

ELGUARNI Mehdi est ingénieur diplômé des Arts & Métiers et de l’Ecole des Ponts ParisTech, certifié PMP®, Prince2, ISO31000, SMAC et SPOAC et actuellement Chef de Projet dans le secteur des Energies. Il a géré des projets pendant 9 ans dans des projets de construction, de maintenance, d’études et de digitalisation. Il est aussi formateur en management de projet, bénévole du PMI France et rédacteur d’articles pour le PMI Lévis-Québec.