Débutons par une analogie!
D’après Wikipédia, l’angle mort est la zone inaccessible au champ de vision pour le conducteur d’un véhicule parce qu’elle n’est pas couverte par la visibilité des rétroviseurs ni sur les côtés du véhicule sans rotation de la tête du conducteur. Comme intervenant lors de nombreuses transformations organisationnelles, nous avons la conviction que le principe de l’angle mort existe également lors de changements : une zone inaccessible au champ de vision sans qu’il n’y ait une analyse de toutes les perspectives possibles. Éviter de vérifier les angles morts est source d’actions regrettables pouvant coûter aussi cher à leur entreprise qu’un accident pour un conducteur irréfléchi.
Riche et fort de nos expériences, l’idée de cet article est de vous présenter la pratique de gestion du changement comme étant des angles forts lors d’un projet ou d’une transformation organisationnelle. Nous aborderons d’abord les dernières tendances en gestion du changement pour ensuite identifier les angles forts et partager les leçons que nous avons apprises. Enfin, il sera question des prochains défis de la pratique de gestion du changement.
Dernières tendances en gestion du changement
Il y a 10-15 ans, les sources de connaissances en gestion du changement se limitaient à quelques livres par année, un article de temps en temps et quelques formations. Aujourd’hui, cette source est multiple et en continu : plusieurs sites Web dédiés, plusieurs instituts à travers le monde, des firmes spécialisées, plusieurs blogs par jour, des ebook mis en ligne tous les mois. Par ailleurs, nous faisons le constat qu’il s’agit d’une pratique qui n’est pas encore consacrée dans de trop nombreuses entreprises et organisations. C’est souvent ce qui est sacrifié en tempsd’austérité, là où on en aurait tellement besoin.
L’accès aux méthodologies, aux approches et aux démarches spécifiques à la gestion du changement dans le cadre d’un projet ou d’une transformation n’est plus un problème. Là où il y a un problème, c’est que ceux-ci ne sont pas intégrés aux cadres normatifs existants dans les entreprises et organisations. Dans le meilleur des cas, l’utilisation d’une démarche de gestion du changement est réalisée, mais dans une sorte de vie parallèle. Par contre, il faut souligner que la volonté d’intégration est de plus en plus marquée. D’ailleurs, suivant une tendance remarquée chez nos voisins du sud, les pratiques de gestion du changement se positionnent de plus en plus comme une unité permanente et stratégique dans l’entreprise ou l’organisation.
Nous remarquons aussi de plus en plus de préoccupations pour évaluer la disposition au changement ce qui est connu comme étant le « change readiness ». Le PMI a d’ailleurs publié un livre blanc sur ce sujet en mars 2014.
Finalement, la pratique de gestion du changement bénéficie d’un inventaire de nouveaux outils de communication. Comme dans plusieurs autres domaines, les technologies de l’information et de la communication (TIC) transforment la façon de communiquer. Les réseaux sociaux y sont pour beaucoup. Tant à l’externe avec les réseaux sociaux bien connus tels que Facebook, Twitter, Linkedin qui permettent d’être en lien avec les parties prenantes externes qu’à l’interne avec les réseaux sociaux en entreprise qui mettent en lien toutes les unités de l’organisation.
Angles forts et leçons apprises en gestion du changement
Plusieurs années d’expérience dans des projets de changement, l’atteinte du succès, des constats d’échec et la confrontation avec de nombreux obstacles nous ont permis d’emmagasiner tout un bagage de connaissances pertinentes. Le tableau suivant fait état de huit angles forts trop souvent négligés dans un projet. Pour chacun de ces angles forts, nous avons identifié nos leçons sous la forme de mises en évidence, de pièges, de risques et de conseils.
Dans quel contexte on doit intervenir en gestion du changement?
La chose qu’on entend le plus souvent de nos jours c’est « complexité » et « incertitude ». C’est d’ailleurs ce qui fait que les approches dites Agile ont la côte. Nous avons quelques données qui décrivent bien ce contexte.
L’Institute for Business Value d’IBM affirme que seulement 20 % des organisations voient plus de 75 % de leurs projets avoir du succès. Autrement dit, la plupart des organisations fréquentent les demi-succès ou les insuccès. La firme Towers Watson arrive quant à eux avec un constat assez troublant : seulement 34 % des employés trouvent que la direction de l’entreprise explique clairement le bien-fondé des décisions. La firme de sondage Gallup a fait l’étude de la qualité des managers en Amérique. Seulement 1 manager sur 10 possède les qualités d’un bon manager et 2 managers sur 10 ont le potentiel pour le devenir. Ça nous laisse avec 7 managers sur 10 qui ont certaines qualités, mais qui sont surtout des personnes reconnues pour leur expertise du contenu. Le résultat d’un sondage réalisé par Change First indique qu’il faut améliorer la capacité d’adaptation des entreprises et organisations et qu’une équipe interne et permanente en gestion du changement doit en prendre charge.
Dans ce contexte, la question que l’on se pose est : est-ce que les pratiques de gestion du changement doivent aller plus loin? À cet effet, nous avons identifié quelques pistes d’action prometteuses.
Quelques pistes pour mieux réussir les changements
À la lumière des leçons que nous avons apprises et du contexte dans lequel on doit intervenir, le « Leadership organisationnel » doit jouer un plus grand rôle. Comme entendu lors du colloque en gestion de projet 2015 : « Le leadership dans le changement, c’est comme la colle dans le tube » (citation de Claude Rousseau). Il n’est donc pas étonnant de voir le PMI s’intéresser à la pratique de gestion du changement. Le Managing Change in Organizations : A practice guide (2013) fait mention de l’importance d’évaluer les capacités du « sponsor » du changement. De plus, le PMI a publié un livre blanc en mars 2014 portant sur le Change Readiness : Focusing Change Management Where it Counts (2014) où il est clair que l’évaluation de la disposition des organisations à changer est une préoccupation.
Les spécialistes de la gestion du changement et les chargés de projet doivent se sentir interpelés. Nous avons deux pistes d’action à suggérer :
- Chercher à impliquer davantage l’équipe de gestion
L’équipe de gestion doit se sentir interpelée par la gestion du changement et savoir qu’elle est en mesure de faire une différence. L’intervenant en gestion du changement doit mettre en lumière les enjeux et les risques associés au projet de transformation. L’occasion du démarrage du projet est un moment opportun pour scénariser l’intervention des gestionnaires, car il permet de se préparer librement plutôt qu’être pris au dépourvu. - Planifier la prise en charge du changement et pas seulement le projet
Il y a une différence entre le projet et le changement. Si le projet bénéficie des lumières d’experts en gestion de projets pour les aspects de planification, d’organisation des activités et de reddition de comptes, c’est moins vrai pour le changement. La fin du projet, sa continuité dans les opérations courantes et sa prise en charge par l’équipe de gestion auraient aussi avantage à être mieux planifiée, organisée et soutenue par l’expertise des chargés de projet.
Présentation de l’auteur
M. Michel Belleau, M.Sc., directeur pratiques d’affaires en gestion du changement et associé à la Société conseil Lambda depuis 2000. Ses interventions de conseiller portent sur la gestion du changement et de la transition depuis plus de vingt ans. Il a réalisé plusieurs interventions pour de grandes organisations publiques québécoises et du domaine de l’assurance.
La réalité des organisations en 2015 est qu’elles doivent composer avec des changements de plus en plus complexes et de plus en plus fréquents. La mobilisation des personnes est un impératif et c’est le défi auquel s’attaque M. Belleau lors de ses mandats.
En mesure d’intervenir avec plusieurs cadres de référence existants sur le marché, il a développé sa propre approche qui combine une orientation axée résultats ainsi qu’une orientation humaine. Comme directeur de cette pratique, il est à l’affut de l’évolution des façons de faire. Il a à son actif la lecture de plus de 100 ouvrages sur ce domaine, plusieurs centaines d’articles dans des revues spécialisées, plusieurs études et sondages ainsi que plusieurs blogs.