Bouthaina Souissi |

L’Intelligence émotionnelle est un concept qui a été découvert par Peter Salovey et John Mayer en 1990 et popularisé par le psychologue américain Daniel Goleman « L’Intelligence Émotionnelle » en 1988. Bien que ses travaux soient à la mode, par le regain d’intérêt que ses travaux suscitent, il reste à notre humble avis, encore mal compris de par son caractère émergent en science de l’administration et insuffisamment pris en compte dans les recherches en gestion de projet. Pourtant, la discipline milite depuis de nombreuses années pour mieux saisir la dimension émotionnelle et l’intelligence collective des équipes de projets. C’est dans cette perspective que cet article s’inscrit qui fait aussi l’objet d’un mémoire de recherche en cours.

Dans le champ disciplinaire de la gestion de projet, le gestionnaire de projet contemporain ne doit pas seulement disposer de compétences techniques pour pouvoir bien faire son travail, mais doit également disposer d’habilités communicationnelles, politiques et sociales, mais doit aussi faire preuve « d’intelligence émotionnelle » de leadership dans la collégialité du fonctionnement du projet. De fait, nous défendons l’idée que le gestionnaire de projet devrait détenir des compétences en intelligence émotionnelle, telles que la conscience de soi, l’adaptabilité, l’empathie, la capacité à convaincre, etc.

Parmi les principes définissant l’Intelligence émotionnelle selon Daniel Goleman, les émotions ressenties à un moment, peuvent non seulement guider nos actions et agir sur la nature de la majorité de nos décisions, mais peuvent aussi influencer les actions et les décisions des personnes qui sont autour de nous et donc influencer leur productivité dans un environnement de travail.

Les travaux académiques disponibles en gestion de projet abordant les enjeux de l’Intelligence émotionnelle ont permis de mettre à jour l’existence d’une corrélation forte entre le succès d’un projet et l’Intelligence émotionnelle. Cela apparaît à travers les travaux en relation avec la performance des coûts et la qualité du projet, en relation avec sa pérennité, en relation avec la satisfaction et la confiance au travail et en relation avec l’efficacité des équipes de projet. Nous assistons donc très probablement à l’émergence d’un des facteurs de la performance des entreprises.

Cependant, les travaux existants ne fournissent pas de propositions sur « le comment de la chose ». Il manque une proposition structurée et cohérente parce que les notions et les concepts sont mal définis mal rattachés à la discipline. Ceci expliquerait, en partie pourquoi l’adoption de l’Intelligence émotionnelle est encore embryonnaire chez certains gestionnaires de projet, malgré une importance et des enjeux déjà mis à jour.

Ce questionnement nous a conduit à envisager un projet de recherche ayant pour finalité de proposer une approche ou une démarche qualitative concrète, opérationnelle et mobilisable concrètement par les entreprises qui permettra de travailler sur le « comment », et d’expliquer les relations de corrélations entre l’intelligence émotionnelle et la gestion de projet. Une problématique, qui schématiquement, tenterait de répondre à la question de savoir : « Comment améliorer la performance d’une équipe de projet à travers la mobilisation de l’Intelligence émotionnelle ? ». Ce questionnement et ce travail de recherche s’attacheraient à mieux « repenser » l’Intelligence émotionnelle dans le but de concevoir une démarche globale et synthétique de sa mise en place dans la gestion de projet, d’introduire d’une manière pratique l’intelligence émotionnelle dans l’entreprise.

Plus spécifiquement, l’Intelligence émotionnelle n’est pas une simple technique de conduite des entreprises. C’est une philosophie globale. Il s’agit d’une véritable transition d’un schéma de pensée vers un autre en matière de gestion et de conduite de projet. Comme pour toute innovation organisationnelle, nous sommes convaincus que l’Intelligence émotionnelle peut jouer un rôle prépondérant dans l’amélioration des performances, pour devenir une partie intégrante de la gestion de projet d’une façon systématique.