Il est désormais évident que nos vies sont intimement liées aux projets, lesquels influencent chaque aspect de notre quotidien. Plus encore dans les organisations, qu’elles soient privées ou publiques, la gestion de projet devient un levier important pour matérialiser les plans et répondre à des enjeux politiques, économiques et sociaux.
Selon certains auteurs (Asquin, Garel, et Picq, 2007), les entreprises ont peut-être mis trop d’emphase sur les innovations organisationnelles, sans accorder une attention suffisante aux besoins des individus. Il y a le sentiment de dépassement de soi pour assumer son autonomie sur les projets, conduisant à l’épuisement professionnel. Les membres de l’équipe deviennent des acteurs acculés, avec cette obligation de rendre compte qui pèse sur chacun. Le projet intensifie la pression de la performance et nourrit un esprit de compétition. Le travail sur les projets crée également le risque de déstabilisation des identités professionnelles : les membres de l’équipe peuvent être animés de sentiments de doute vu leur immersion dans un univers qui leur échappe parfois.
Des enjeux humains au cœur des Projets
Ballesteros-Sanchez et al. (2019) constatent que même en faisant preuve d’un professionnalisme exemplaire, les chefs de projet se heurtent fréquemment à des délais irréalistes, à des contraintes de ressources, et parfois à un déficit d’engagement de la part des parties prenantes, ce qui rend difficile la réalisation de leurs objectifs. Cette situation indique que malheureusement, lorsqu’ils sont acculés par ces contraintes précédemment évoqués, les chefs de projets remettent cette pression sur les membres de leurs équipes, ce qui compromet dangereusement leur équilibre émotionnel et psychologique. Lindgren et Packendorff (2006) déplorent également cette situation en faisant le constat qu’il arrive fréquemment que l’on exige des travailleurs de projet qu’ils réalisent des exploits impossibles, sans se préoccuper des conséquences sur leur vie personnelle.
Éviter à tout prix les pathologies liées à la surcharge de travail
Certaines études révèlent que dans le but de répondre aux aspirations de performance dans certains corps de métier, certains travailleurs font du dopage médicamenteux. Cette situation engendre des conséquences désastreuses comme des troubles musculosquelettiques, des atteintes inflammatoires douloureuses au niveau des articulations, des tendons et des extrémités, du karôshi et du burnout. Important de préciser aussi l’épuisement émotionnel et la dégradation du sentiment d’accomplissement personnel liés à la non-reconnaissance des efforts du travailleur (Demaegdt et al., 2013). Ces auteurs mentionnent que la qualité totale ou le « zéro défaut » n’est qu’un leurre impossible à atteindre. Cette contrainte agit négativement sur la santé mentale du professionnel en provoquant des formes de souffrance éthique (une dégradation de l’estime de soi). Nous matérialisons ces pathologies liées à la surcharge et aux fortes pressions au travail à travers la figure suivante :
Source : Inspirée de Demaegdt et al., 2013.
Équilibre travail-vie privée : un rempart contre l’épuisement professionnel dans les Projets
Plusieurs recherches confirment qu’équilibrer travail et vie personnelle réduit les répercussions négatives des heures de travail, du stress au travail sur la santé mentale. Dans le cadre d’un projet, le contrôle et le soutien social exercent une influence modératrice sur les composantes de l’épuisement professionnel (Pirzadeh et Lingard, 2021).
Bibliographie
Asquin, A., Garel, G., Picq, T. (2007). Le côté sombre des projets: quand les individus et les collectifs sociaux sont mis en danger par le travail en projet. Gerer & comprendre, 90(90):43-54.
Ballesteros-Sanchez, L., Ortiz-Marcos, I. et Rodriguez-Rivero, R. (2019). The impact of executive coaching on project managers personal competencies. Project Management Journal, Vol. 50 No. 3, pp. 306-321.
Demaegdt, C., Dejours, C. et Rolo, D. (2013, juillet). Psychopathologie et psychodynamique du travail. https://www.researchgate.net/publication/288950211. EMC – Pathologie professionnelle et de l’environnement 2013;8(3):1-11 [Article 16-793-E-15].
Lindgren, M. et Packendorff, J. (2006). What’s new in new forms of organizing? On the construction of gender in project-based work. Journal of Management Studies, Vol. 43 No. 4, pp. 841-866
Pirzadeh, P. et Lingard, H. (2021). Working from home during the COVID-19 pandemic: health and well-being of project-based construction workers. Journal of Construction Engineering and Management, Vol. 147 No. 6, 04021048.
À propos de l’auteur
Pendant vingt et un an (21) ans de vie professionnelle, M. Aziawo a acquis les aptitudes en gestion de projet et travaille pour le gouvernement du Québec depuis août 2022, où il occupe le poste de contrôleur de projet au ministère de la Sécurité publique. Il possède une maîtrise en gestion de projets et est en train de préparer une thèse en management de projets à l’UQAC.