[vc_row][vc_column][vc_column_text]Christophe Leyrie1 et Sonia Boivin1
LemGP, UQAC
De plus en plus d’auteurs reconnaissent désormais l’importance d’une réelle prise en compte des parties prenantes dans l’appréhension des critères et des facteurs de succès des projets (Hughes et al., 2016). Cette tendance relève d’une vision renouvelée des parties prenantes dans les projets incarnée par le passage d’une gestion « des » parties prenantes à une gestion « pour » les parties prenantes, d’une vision instrumentale, qui s’intéresse aux parties prenantes en fonction de leur capacité de nuisance ou de contribution au projet, à une vision plus normative où la création de valeur pour les parties prenantes est centrale. Cette vision normative semble toutefois avoir bien du mal à trouver son chemin dans la pratique, faute d’approches pouvant réellement et concrètement permettre une gestion de projet inclusive qui soit à la fois efficace et efficiente. Dans cette perspective, la co-construction semble avoir émergé comme une voie intéressante, alors qu’elle est de plus en plus mobilisée dans la littérature et dans la pratique de la gestion de projet. À titre d’exemple, la mine Canadian Malartic revendique dans ses communications externes un engagement clair à cohabiter de façon harmonieuse avec la collectivité grâce à une telle démarche de co-construction.
Mais que veut dire co-construire en contexte de gestion de projet ? Plusieurs études évoquent dans ce cadre la co-construction sans toutefois la définir et sans expliciter la façon de la mettre en œuvre. Pourtant, quelques rares auteurs proposent une réflexion théorique qui permet de mieux en cerner les contours. Foudriat (2019, p17) définit par exemple la co-construction comme « un processus volontaire et formalisé par lequel deux ou plusieurs individus (ou acteurs) parviennent à s’accorder sur une définition de la réalité (une représentation, une décision, un projet, un diagnostic) ou une façon de faire (une solution à un problème) ». Bien qu’éclairante, cette définition donne toutefois encore peu d’indications sur la façon d’opérationnaliser ce processus dans les projets.
Qu’en est-il donc de la mise en œuvre de la co-construction ? Afin d’alimenter la réflexion à ce sujet, une étude de cas exploratoire dans le contexte de la gestion d’un projet de changement organisationnel nous a permis d’établir quelques constats préliminaires. Parmi ceux-ci, nous pouvons évoquer ici la nécessité d’adapter les approches de planification stratégique et opérationnelle. L’action planifiée dans un but prédéterminé doit ainsi laisser place à une action finalisée à l’intérieur de limites temporelles. De même, le rapport à l’autre doit lui aussi se transformer. Le rôle et la place des acteurs évoluent dans un contexte où le projet n’est plus abordé comme une démarche cohérente et organisée rationalisée à partir des seuls points de vue de la direction et des gestionnaires.
À partir des quelques constats très brièvement évoqués ici, on peut donc percevoir qu’une démarche de co-construction devra prendre place dans une organisation et des projets marqués par une approche de la gouvernance qui repose sur une culture de participation, d’ouverture et de confiance. Dans ce contexte, les acteurs projet, au premier rang desquels les chefs de projet, devront apprendre de nouvelles façons de contribuer aux projets et développer de nouvelles compétences au fur et à mesure des co-constructions. En réalité, la co-construction dans les projets nous apparaît comme une compétence collective devant être développée au niveau des acteurs, des collectifs, mais aussi des organisations.
Présentation des auteurs
Sonia Boivin, est titulaire d’un doctorat en psychologie (Ph.D.) et est doctorante en gestion de projet. Professeure en management à l’UQAC depuis l’automne 2018, elle possède une vingtaine d’années d’expérience dans le réseau de la santé et des services sociaux comme psychologue et gestionnaire. Ses intérêts de recherche portent principalement sur l’implication des parties prenantes dans les projets, particulièrement dans un processus de co-construction. Elle s’intéresse aussi au croisement du processus de co-construction avec les approches agiles en gestion de projet.
Christophe Leyrie, docteur en sciences de gestion de l’Université Jean Moulin de Lyon, est professeur de gestion de projet à l’UQAC depuis 2000. Ses intérêts de recherche portent principalement sur la dimension sociale des projets et plus particulièrement sur les approches participatives dans la gestion des parties prenantes et la co-construction dans les projets. Il a œuvré pendant plusieurs années à titre de responsable de projet, de formateur et de consultant en gestion de projet pour diverses organisations publiques et privées en France et au Québec
[1] Ce texte est issu d’un article déjà publié par les auteurs. Leyrie, C. et Boivin, S. (2017). Gestion de projet et co-construction: utopie ou voie du succès? Une réflexion exploratoire. Organisations et territoires, 26(1/2), p. 117-129.[1][/vc_column_text][/vc_column][/vc_row]