[vc_row][vc_column][vc_column_text]NDLR : À bien des égards, l’industrie de la construction a innové en gestion de projet. Pour les praticiens d’autres domaines, cet article peut servir d’inspiration pour ajuster nos pratiques au monde durable et, en particulier, pour la portion qui traite du mode agile. Faites-vous plaisir !  

L’industrie de la construction, comme bien d’autres domaines, fait face à une frontière culturelle qui percute et freine l’évolution des pratiques. Dans un monde où nous devons agir pour le bien commun et dans le respect des capacités de la terre à se régénérer, les pratiques doivent changer et revoir leurs priorités. En se sens, il est plus important de se concentrer sur ce qui fait autorité dans un projet plutôt que sur qui a autorité.

Le développement durable transforme les industries afin qu’elles prennent en compte non seulement les éléments économiques, mais aussi les facteurs environnementaux et sociaux. Néanmoins, le développement durable est encore trop souvent réduit à ses aspects purement économiques, ce qui rend les projets non viables et non rentables dans le long terme.

Cette situation est en évolution car ce constat amène les industries à prendre conscience que la viabilité de leurs activités est intimement liée à la viabilité de la société elle-même, dans un contexte où elle dépend de son environnement. À cet effet, l’industrie de la construction ne fait pas exception. Dorénavant, cette industrie doit soutenir l’implantation de bâtiments durables (également appelés « bâtiments verts » ou « écologiques ») qui tiennent compte d’une utilisation efficiente des ressources et de la nécessité de se préoccuper des externalités environnementales.

Les futures réalisations de l’industrie de la construction devront se baser sur de nouveaux paradygmes. Arrêtons de parler d’efficacité énergétique comme synonyme de durabilité des projets, parlons de l’ensemble des éléments prioritaires que sont l’habitat humain et écologique, l’eau, l’énergie, les matériaux et ressources, sans toutefois négliger le volet financier. Finalement, il faut remettre un certain équilibre dans le poids de nos critères décisionnels, pour que l’environnement, le social et l’économie se portent mieux. Il faut redéfinir nos villes, nos quartiers et nos bâtiments !

Nos sociétés – Nos bâtiments

« Dans une perspective de développement durable, il importe tout autant de considérer les besoins pour lesquels nos bâtiments sont conçus que de prévoir leur adaptabilité face à des besoins changeants, leur consommation de ressources (matériaux, eau, énergie, etc.) ou encore l’ensemble de leurs coûts directs et indirects. » (Boucher, Isabelle, Pierre Blais et Vivre en ville. 2010. Le bâtiment durable: Guide de bonne pratiques sur la planification territoriale et le développement durable. Ministère des Affaires municipales, des Régions et de l’Occupation du territoire, p. 6)

En raison de ce qui précède, les principes des bâtiments durables amènent un changement de culture significatif qui modifie considérablement la réalisation de projets. Considérant les nouveaux enjeux découlant des multiples critères relatifs au développement durable, les professionnels doivent résoudre des problèmes additionnels avec une plus grande étendue en conjuguant avec la complexité de l’industrie.

La réalisation de bâtiments durables accentue les besoins d’un corps professionnel spécialisé et complexifie les tâches et les interactions de conception, construction et opération. Ainsi, les gestionnaires de projets doivent s’adapter à cette réalité et ils se doivent de considérer l’ensemble des éléments précédents dans les processus qui leur sont confiés soit la planification, l’organisation, la direction et le contrôle des projets. Comment faire? La réponse à cette question passe par l’intégration des prémisses du développement durable dans un processus unique de réalisation de projets afin d’optimiser les retombées dans un temps, un coût et une qualité escomptés. Il importe de fixer ces paramètres le plus tôt possible dans l’élaboration d’un projet. Ce qui demande un temps de réflexion au préalable!

À travers ce changement de culture, la réalisation de projets exige une modification du processus de réalisation qui implique une redéfinition des priorités, un changement de mentalités et des efforts pour établir de nouvelles relations de travail. Les acteurs et les intervenants doivent travailler dans un environnement hautement collaboratif et multidisciplinaire pour rechercher les opportunités réalisables d’optimisation de la performance. Actuellement, seulement l’atteinte de solutions fonctionnelles selon un budget fixe est possible, due en partie à la chaîne d’approvisionnement fragmenté et linéaire qui caractérise ce type de projets.

La figure 1 illustre la réorganisation du travail des professionnels liée au changement culturel associé à la prise en compte du développement durable et l’introduction du travail collaboratif qu’il suppose

Figure 1: Processus de réalisation de projet traditionnel versus collaboratif

Le processus de conception traditionnel est inadéquat pour la réalisation de bâtiments durables et innovants. Cette problématique amène un questionnement sur la façon d’intégrer la participation et l’apport des professionnels, et un changement dans les rôles et responsabilités des acteurs et intervenants. L’évolution des pratiques entraine un changement profond dans le travail des professionnels. Le processus de conception intégrée (PCI) est le reflet de ces changements. L’intégration des enjeux de durabilité et le changement des pratiques devraient s’appuyer sur le PCI.

ÉVOLUTION ET INNOVATION : Le PCI pour la réalisation de projets

Le PCI réunit les professionnels en amont du projet afin d’optimiser les solutions de conception par l’atteinte de synergies d’équipe et des systèmes considérant le cycle de vie complet du bâtiment. Le PCI favorise la collaboration, la communication et le partage de l’information tôt dans le processus de réalisation, ce qui laisse place à la réflexion, c’est-à-dire à la création de projets innovants. D’ailleurs, les propriétaires ou client peuvent réaliser des bénéfices significatifs sur les projets en utilisant un processus de conception intégré (PCI) et des outils de « Building Information Modeling » (BIM) pour optimiser la livraison de bâtiments performants et de meilleure qualité. En ce sens, le processus de livraison est plus efficace et plus fiable, réduisant le temps et le coût du projet.

En ce qui a trait à l’outil d’aide à l’intégration, plusieurs proposent le BIM comme processus technologique pour soutenir l’optimisation et l’intégration des fonctionnalités de conception. Toutefois, cet outil technologique peut à la fois soutenir comme entraver les aspects de la collaboration tels que la communication, l’apprentissage collaboratif, la création de connaissances et l’échange. À cet égard, il est nécessaire de résoudre les questions à la fois techniques et sociales du travail collaboratif. C’est pourquoi le processus est plus important que la technologie dans l’adoption du BIM. Le BIM est seulement la réponse technologique à la réalisation de solutions intégrées. Dans ce cas, l’organisation et planification sont essentielles. D’ailleurs, la clé du succès de la bonne gestion du PCI et du BIM c’est la nomenclature!

En ce qui précède, le travail collaboratif est indispensable au PCI autant que le PCI est indispensable à l’efficacité du BIM. La réussite des projets dépend beaucoup du niveau de collaboration. C’est pourquoi il faut absolument planifier, contrôler, favoriser et faciliter les aspects de la collaboration. En ce sens, voici ci-dessous un sommaire des outils de soutien (figure 2).

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Figure 2 : Outils de soutien au processus de conception intégrée

Néanmoins, il faut faire attention à ne pas confondre la coordination et la collaboration. Actuellement, certaines entreprises se tournent vers les services intégrés. Ces services sont plus souvent qu’autrement un regroupement d’expertises et de compétences sous une même bannière. Ce qui parait comme un changement vers les nouvelles pratiques de conception est plutôt une réorganisation opérationnelle, et non pas un changement des pratiques.

La tendance de l’industrie de la construction vers la réalisation de bâtiments durables transforme sa structure organisationnelle et sa chaîne d’approvisionnement. Seule l’implantation d’une approche collaborative comme le PCI permettra d’atteindre les résultats escomptés et de réaliser des projets durables. Toutefois, le travail est encore réalisé en silo. Par conséquent, il est difficile d’intégrer ces principes de collaboration car le niveau de maturité de l’industrie amène certains professionnels à confondre coordination et collaboration. C’est ici que de nouveaux intervenants doivent intervenir et accompagner les équipes de projet. Ici nous ciblons les gestionnaires de charrette (de projet) et du facilitateur.

Les intervenants essentiels à l’intégration des enjeux de durabilité

Le gestionnaire de charrette (de projet) est responsable des rôles de gestion et de facilitation. Dans le cas contraire, le facilitateur sera responsable de la planification des charrettes. Ces derniers travaillent en étroite collaboration. Le rôle de facilitation est important afin de générer et de maintenir la synergie d’équipe. Son principal rôle est de s’assurer du bon déroulement du PCI. Pour ce faire, il doit jauger les personnalités de chacun, comprendre les différents points de vues et s’assurer que tous participent.

Pour assurer le processus créatif, il n’est pas recommandé que l’architecte concepteur agisse aussi comme facilitateur, puisqu’il devient juge et fait partie de la conception. Son influence prédominante risque de freiner la créativité et l’innovation dans le processus de prises de décisions. Par ailleurs, la participation de certains consultants spécialistes peut-être approprié afin d’éclaircir et soutenir l’aide à la décision des professionnels concepteurs. Leurs apports doivent être bien planifiés afin que leurs interventions soient pertinentes et favorisent la créativité dans l’intégration du concept.

Voici des exemples de consultants spécialistes : Ingénieur des sols (Géotechnique), Agent de mise en service, Écologiste, spécialiste en énergie et modélisateur, spécialiste de la planification et du contrôle des coûts (économiste de la construction), spécialiste en réglementation (Approbations selon les codes), designer d’intérieur/consultant en matériaux, spécialiste en éclairage ou en éclairage naturel, etc. La figure 3 montre l’ensemble des intervenants et du corps professionnels dans le cadre d’une équipe intégrée.

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Les processus d’agilité et d’innovation pour mieux comprendre le PCI

Le PCI est un processus qui est la combinaison de la méthode agile utilisée surtout en développement logiciel et la méthode du « stage gates » utilisé pour la gestion de l’innovation. En fait, le travail collaboratif et itératif que représentent les méthodes agiles s’attribue facilement au processus de travail et aux charrettes de conception dans un PCI. Par ailleurs, Chacune des charrettes est en soi une porte du processus du « stage gates ». Les figures 4,5 et 6 présente les différents processus de travail afin de schématiser les itérations à travers la réalisation d’un projet.

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Figure 4 : Processus de travail ” Agile ”

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Figure 5: Processus “STAGE-GATE”

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Figure 6: Processus de conception intégrée

La méthode agile et la méthode du « Stage-Gate » ont fait leurs preuves respectivement dans la réalisation de développement de logiciels et de nouvelles technologies. L’une pour simplifier la complexité afin obtenir la qualité d’un produit optimal et l’autre pour gérer l’innovation et la création du prototype jusqu’à sa commercialisation.

Ces deux processus de développement se basent sur des principes similaires et complémentaires permettant de considérer la complexité d’un projet et de parvenir à des résultats de qualité et innovants laissant place à la créativité. En raison de ce qui précède, le PCI est le processus qui réuni ces principes pour concevoir, construire et opérer des projets optimaux. Autrement dit, le PCI est un processus créatif qui chemine à travers des boucles itératives d’analyse et de recherche pour optimiser le concept, et ce, à travers un processus décisionnel pour chaque phase de réalisation.

Conclusion

L’industrie de la construction est devant un défi de durabilité de ses livrables dans un contexte très complexe où l’on retrouve des parties prenantes multiples, des cultures organisationnelles, des compétences et une expertise propre à chacune. Ainsi pour parvenir à répondre aux enjeux du développement durable en minimisant les risques voici les domaines de gestion les plus importants : l’intégration, les communications, les risques et le changement. C’est pourquoi le gestionnaire de charrette et le facilitateur sont indispensables.

Pour en savoir d’avantage sur le PCI et sur le travail collaboratif je vous invite à visiter pointci.com et consulter les ouvrages dans la section Ressources. Vous y trouverez le premier guide sur le processus de conception intégrée (PCI) réalisé par un partenariat GRIDD et CERACQ ainsi que le mémoire sur les recherches qui ont conduit au guide. En résumé, la figure 7 démontre bien le portrait de l’équation qui nous permettra d’optimiser nos projets dans le respect des enjeux de durabilité.

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Figure 7: Synthèse des intrants et extrants dans la réalisation de projets durables

 

Présentation de l’auteur

A1 Photo Jean PhilippeJean-Philippe Dionne a obtenu son baccalauréat en génie de la construction en 2012. Passionné par le développement de bâtiments durables, il a réalisé en 2015 une maîtrise en énergies renouvelables et efficacité énergétique sur le processus de conception intégrée (PCI).

Redéfinir le domaine dans un objectif d’optimisation des résultats par des solutions globales, innovantes et éprouvées est un des concepts qu’il préconise. Son intérêt marqué à l’égard des projets durables l’a amené à suivre plusieurs formations, notamment sur l’environnement et le bâtiment durable, le BIM (Building Information Modeling), la structure et ossature de bois ainsi que les toitures végétales. D’ailleurs, Jean-Philippe a réalisé en partenariat avec le GRIDD et le CERACQ le premier guide sur le processus de conception intégrée pour l’industrie de la construction au Québec. Ce guide a été endossé par Hydro-Québec comme référence pour son programme d’incitation à la conception intégrée. C’est finalement en 2016 qu’il entame son projet PointCI à l’aide d’un site web pour échanger et cibler les besoins des professionnels face à l’approche collaborative du PCI.

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